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28/01/2008

Rémunération des dirigeants d’entreprise : le PDG ne doit plus être un salarié !

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 Michaël Cheylan
Auteur
Contributeur sur les questions africaines

La rémunération des dirigeants de société suscite à intervalles réguliers des débats animés dans tous les grands pays développés. La France n’échappe pas, loin de là, à la règle. Tout le monde a en tête les quelques cas particuliers qui ont particulièrement fait scandale ces dernières années. Dans ces « affaires » là, ce qui frappe, et ce que retient en général – et à juste titre - l’opinion publique, ce sont les montants en jeux – plusieurs dizaines de millions d’euros. L’équivalent pour nombre de Français de plusieurs dizaine d’années de labeur !

Mais il est un autre scandale qui lui n’est que rarement relevé et qui, en fait, explique en grande partie ces dérives : le fait que le PDG cumule le plus souvent, en France, la rémunération atypiquement élevée d’un mandataire social et la protection très élevée d’un salarié. Et oui, rares sont ceux à le savoir mais la plupart des dirigeants jouissent en effet d’un… contrat de travail. Officiellement, celui-ci est certes « suspendu » durant l’accomplissement du mandat social de dirigeant d’entreprise ; mais on hésitera pas à le ressortir du tiroir au jour de la séparation – en agitant la menace, plus ou moins explicitement, de faire valoir ses droits de salarié devant le tribunal des prud’hommes.

Si l’on veut réellement rétablir la révocabilité ad nutum* des mandataires, aujourd’hui fortement compromise, et que cessent les scandales des évictions qui enrichissent même ceux qui n’ont pas été à la hauteur de la tâche, alors il faut interdire le cumul d’un mandat social et d’un contrat de travail. Comment, d’ailleurs, a-t-on pu accepter que soit salarié (état caractérisé par un « lien de subordination ») celui-là même qui dirige l’entreprise ? La vérité, c’est qu’un mandataire est une sorte de travailleur indépendant qui preste ses services à un client, la société qu’il dirige, et non un salarié. Le droit doit en prendre acte.

Naturellement, si l’on demande à un salarié de renoncer à l’être au moment où il reçoit un mandat de dirigeant, alors il faut l’indemniser. C’est la raison pour laquelle l’Institut Montaigne propose de payer des « golden hellos » plutôt que des « golden parachutes ». Ce changement peut paraître marginal. Il est, au contraire, révolutionnaire. Parce que plus aucune indemnité de séparation ne sera due, le droit du travail ne s’appliquant pas. Parce que la révocabilité ad nutum sera rétablie. Enfin parce que l’on règle aussi, en passant, la question des retraites chapeaux. Réservées à des salariés, elles ne sauraient être mises en place au bénéfice d’un « indépendant », lequel doit pourvoir à sa protection sociale par ses propres efforts. Commerçants, professions libérales cotisent sur leurs deniers à des caisses dédiées et à des dispositifs de prévoyance, pourquoi pas les PDG ?

Les ambiguïtés de la relation entre l’entreprise et son dirigeant expliquent la quasi-totalité des dérives récentes. Levons-les en posant clairement en principe que le PDG n’est pas un salarié.

    *Expression latine qui caractérise le fait que celui qui a confié un mandat à une autre personne est en droit de retirer les pouvoirs qu'il lui a confiés sans avoir à justifier des motifs de ce retrait, ni observer un préavis, ni même être contraint - sauf application des règles de l'abus de droit - de lui verser un dédommagement. Il en est généralement ainsi des mandataires et particulièrement des mandataires sociaux (gérants de SARL, PDG et administrateurs de sociétés anonymes).
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